Le Petit SEM : une vénérable institution
Le Petit SEM : une vénérable institution
Cette photo date de 1963, dernière année de mon séjour de sept ans entre ses vénérables murs. Sans doute est-elle de moi, mais les suivantes seront de Bernard DOUSTEYSSIER, ici en premier plan sur le mur des Allées. Les années passées au petit séminaire de Saint-Flour ont été pour moi essentielles, fondamentales, et ont constitué la base solide sur laquelle a pu se bâtir ensuite toute mon existence. C'est là que m'ont été transmises, patiemment et fermement, les valeurs humaines que j'ai à mon tour essayé de transmettre ensuite dans mon métier (sacerdoce ?) d'enseignant, le seul souhait que je formulerai aujourd'hui à cet égard étant de m'être montré le plus possible dans ma carrière de professeur digne de ceux qui à cette époque furent pour moi des maîtres... magnifiques !
Institution de la Présentation de Marie : tel est le nom officiel de cet établissement qui se détache dominant le rocher sur lequel est accrochée la partie haute de Saint-Flour. Il date du début du XIXème siècle. Je retiendrai simplement que ce pensionnat ecclésiastique fut dirigé de 1827 à 1832 par Jean-Gabriel PERBOYRE. Ca ne vous dit rien ? Normal ! Pourtant aucun de ceux qui sont passés régulièrement dans la chapelle n'ont pu oublier la statue de ce missionnaire agonisant sur sa croix de souffrance qui surplombait le petit autel à droite de l'allée centrale (cf. photo ci-dessous, extraite de "Paroles d'anciens élèves"). Car ce premier Supérieur du Petit Sem mourut torturé en Chine interdite, crucifié après maintes épreuves, sans jamais renier sa foi ni céder à la tentation de livrer d'autres missionnaires pour s'épargner de dures souffrances.
Professeur de théologie dogmatique à Saint-Flour, il avait été nommé en septembre 1832 à la direction du noviciat des Lazaristes de Paris. Parti en Chine comme missionnaire en février 1835, après cinq mois de voyage, il arrivait à Macao et, après avoir appris le chinois, partait en mission au Honan, secteur très pauvre qui comptait de nombreux chrétiens. Alors qu'une certaine tolérance envers eux règne dans l'empire chinois, le vice roi décide brutalement une persécution. Notre jeune missionnaire est arrêté dans les locaux de la mission le 15 septembre 1839, puis traîné de tribunal en tribunal et subit les pires tortures avant d'être finalement condamné à mort et étranglé, attaché à un poteau en forme de croix, avec une corde qui lui serrera la gorge par trois fois. Le 11 septembre 1840, à l'âge de 38 ans. Peu de gens savent aujourd'hui qu'une grande croix lumineuse apparut alors dans le ciel et fut visible des lieux les plus éloignés. Ainsi imita-t-il le Christ jusque dans sa mort, après l'avoir imité tout au long de sa propre vie ! Béatifié par Léon XIII le 10 novembre 1889, il a été canonisé par Jean-Paul II le 2 juin 1996.
J'ai retrouvé dans l'ouvrage publié par l'Association des Anciens Elèves de l'Institution de la Présentation, "Paroles d'Anciens Elèves", en 2004, un poème anonyme écrit sans doute par un ancien entre 1855 et 1862. Il révèle, dans le style grandiloquent de l'époque, toute la qualité de l'enseignement rhétorique au Petit Séminaire au milieu du XiXème siècle, qualité qui sera toujours la "marque de fabrique" de la Présentation, de sa solidité, de son intemporalité tant il est vrai que, ancrée dans le basalte le plus solide, elle a su résister aux vicissitudes du temps, sous la direction de tant de bons pères... sur lesquels je reviendrai. Qu'il me soit permis d'en retranscrire les quatre premiers vers :
Qui l'a placé, là-haut, ce Petit-Séminaire,
Sur ce roc élevé, comme l'aigle sur son aire ?
Qui donc sur le granit posa ses fondements ?
C'est le Christ qui le fit pour braver les autans.